Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Alchemia
18 juin 2007

Hanter le moi

la_chute_d_Icare

Ce devait être en 2003 ou début 2004. A cette époque, je me saisissais de tout ce qui ressemblait à du papier vierge pour écrire, épancher, délirer, raconter. Et puis je me sentais hanté par cet autre en moi, qui venait hanter mon moi, faire grésiller la clarté de mes lucidités. Cette présence étrangement familière gisait là, au plus proche de ma conscience, et je l'avais appelée mon anti-moi, ou antémoi, pour le jeu de mot avec hanter.
Si j'avais été familier de la psychologie analytique à l'époque, je l'aurais sûrement appelée mon ombre : la formation psychique de ce que je ne considérais pas être moi, mais qui était en moi, à la manière de tous ces contenus inconscients que l'on laisse de côté par désintérêt, refoulement, compensation ou transformation. Mais j'étais surtout familier de la psychanalyse, et vraiment je sentais que mon antémoi n'avait formellement rien à voir avec le Ça... Il faut dire que selon monsieur Freud le Ça représente le magma incandescent complètement impulsif de la psyché instinctuelle et refoulée.
Or je ne sentais pas mon antémoi complètement impulsif, mais je le sentais tout simplement différent de moi, autre, et pourtant intimement rattaché à moi. C'est pourquoi je ne pouvais pas raisonnablement le rattacher au Ça.
L'antémoi était comme un frère, avec tout ce que cela comporte de rivalités, de chamailleries, de castagnes et de solidarités. Cette définition lui convient bien.
J'imagine qu'un clinicien aurait eu peur de voir poindre une tendance schizoïphrène chez moi, mais si je ne peux pas nier que cette histoire de moi/antémoi est réellement schizoïde, je ne peux pas accepter que l'on me qualifie de schizophrène.
En fait, ce n'était pas mon moi qui se dissociait comme dans la démence précoce, mais c'était un contenu autonome de mon inconscient qui se faisait jour et qui même acquérait une dimension suffisamment importante à mes yeux pour perturber mes activités courantes. Bref, il y avait là tentative de prise de contrôle, qui n'était pas sans rapport avec le film Fight Club, quoique je n'aie jamais été insomniaque au point de laisser les commandes de mon corps à l'antémoi.
Plus tard, en découvrant la psychologie analytique, j'ai fait un peu n'importe quoi, et quelques choses intéressantes. En fait j'étais profondément marqué par l'idée qu'il faille personnifier imaginairement ses complexes autonomes pour pouvoir négocier avec eux et finalement retrouver l'équilibre. C'était en 2004-2005. Alors j'ai personnifié à la sauvage mon antémoi, je suppose, sous trois formes différentes : Mister J, où la part brutalement émotionnelle ; un spectre-loup, où la part sauvagement instinctive ; enfin une fille putride, où la part faramineusement effroyable.
On peut dire que le spectre-loup avait plus de rapports avec la Ça que les autres, mais il était très calme et protecteur, quoique menaçant parfois. La fille putride était celle de Ring, avec laquelle je me suis sacrément entretenu en imagination, parce qu'il fallait que je me débarasse de cette foutue peur qu'elle suscitait chez moi.
C'est par elle que j'ai commencé à me libérer de l'influence de mon antémoi. Ensuite, j'ai pris en compte le spectre-loup, et ça a été relativement aisé parce qu'il n'était pas fondamentalement méchant. Enfin ne restait plus que Mister J. C'était éprouvant de se battre avec lui, même imaginairement. Le moral est mis à rude épreuve... Il fallait souvent que je lui casse la gueule pour qu'il se calme. Il ne m'en voulait pas. Mais lors de notre dernier affrontement, j'ai eu en tête le combat final de Matrix 3, et j'ai laissé Mister J m'envahir, si bien que s'opéra comme une inversion : mon antémoi avait pris mes traits, mais je n'avais pas de miroir pour voir si j'avais pris les siens.
Quoiqu'il en soit, tout cela termina effroyablement par le sentiment énorme d'avoir compris toutes les ramifications de mon inconscient, chacun de ses archétypes, chacune des structures cognitives de mon cerveau, tout le réseau nerveux de mon corps, et j'étais épris sporiadiquement par les éclats d'un rire d'or, du profond duquel je me suis pensé renouvelé, comme un guerrier de lumière, un espèce de Superman de l'âme... mais qu'est-ce que j'aurais eu l'air con, si on avait pu voir ce qui se jouait en moi ! C'était à ce foutre de moi, à ce fendre la poire, à pleurer de rire ! Et c'est pour cela que je riais, mais je ne le savais pas... Qui étais-je, du haut de mon mètre quatre-vingt, pour me croire pareil aux dieux ?! Il fallait que je désenfle !
Et c'est arrivé très vite, par un contrecoup déprimé jusque début 2006, où je me suis senti être une sombre merde, d'autant plus que j'étais désoeuvré côté occupations...
Au final, j'ai rencontré mon ex, que j'ai pris pour ma rédemption. Ce jour là, je pensais finir dans les bras de notre amie commune, mais elle a intercédé, et moi qui était libidineux en même temps qu'avide de guérir mon coeur, je me suis vautré sur elle comme un gentleman jusque début 2007 !

Publicité
Publicité
Commentaires
Alchemia
Publicité
Derniers commentaires
Publicité